L’Éloge de la Folie

Notre volume est une très belle édition de cette « fiction burlesque et allégorique, qui doit peut-être quelque chose à l’œuvre De triumpho stultitiae de l’humaniste italien Faustino Perisauli de Tredozio (près de Forlì). Érasme y fait parler la déesse de la Folie et lui prête une critique virulente des diverses professions et catégories sociales, notamment les théologiens, les maîtres, les moines et le haut clergé, mais aussi les courtisans dont nous avons une satire mordante.

Erasme a excellé dans le genre satirique. Ainsi, il est l’auteur des Colloques, piquante satire des mœurs de son époque qui souligne l’indépendance de son esprit. Mais dans l’Éloge de la Folie, la satire s’élargit et dépasse l’époque de son auteur pour atteindre la société humaine en général. L’ouvrage sera mis à l’Index en 1557 lors de la Contre-Réforme. Elle commence avec un savant éloge imité de l’auteur satirique grec Lucien, dont Érasme et Thomas More avaient récemment traduit l’œuvre en latin, un morceau de virtuosité dans le délire.

Le ton devient plus sombre dans une série de discours solennels, lorsque la folie fait l’éloge de l’aveuglement et de la démence et lorsqu’on passe à un examen satirique des superstitions et des pratiques pieuses dans l’Église catholique ainsi qu’à la folie des pédants. Érasme était récemment rentré profondément déçu de Rome, où il avait décliné des avances de la Curie. Peu à peu la Folie prend la propre voix d’Érasme qui annonce le châtiment.

L’essai se termine en décrivant de façon sincère et émouvante les véritables idéaux chrétiens. Le titre que nous lui connaissons aujourd’hui, d’« Eloge de la Folie », apparaît pour la première fois dans la traduction de Gueudeville, dont la première édition remonte à 1713.

Provenance : Ex-libris gravé armorié Thomas Phillips Price ; médaillon de cuir doré ajouté en tête du dos : gantelet tenant un trèfle et couronné. (Cohen, 348). Exemplaire sur grand papier, tiré au format in-4, le texte étant au format in-12 ; aussi le frontispice est-il enrichi d’un encadrement spécial à ce tirage de luxe, gravé par P. Martinasie sous la direction de P. Le Bas. Belle édition réalisée avec soin, illustrée de figures gravées sur cuivre d’après les compositions de Eisen, soit : 13 planches, 3 vignettes (1 au titre, 1 en début du texte et 1 à la fin), 1 frontispice.