Description
Dimanche de la sexagésime.
La Sexagésime est le deuxième dimanche qui prépare la période de carême. Cet incipit annonce la couleur : il va être question de privation, de jeûne, d’auto-flagellation et de purification !
Mystique ! On ne peut plus l’être ; devrait-on dire méta-mystique, supra-rationnel ! Ce manuscrit d’une rigueur luthérienne, rédigé très servilement avec une humilité judéo-chrétienne exemplaire est une véritable profession de foi. De citations en élucubrations pseudo-divines, notre auteur proclame, assène et professe la vraie religion, la seule religion. Les mots « souffrances » et « humiliation » apparaissent à chaque page et le délire s’intensifie à mesure que son auteur manque d’inspiration… plus son discours peine à encourager l’auto-flagellation, plus sa culpabilité l’envahit. Il se dégage un sentiment de profond écrasement de l’Homme ; une désespérance pathologique et une aversion pour l’humain. Ce n’est pas un cercle vicieux mais un vice circulaire qui dévaste sa raison. Il communique littéralement avec « le Seigneur ». Page 388 : « …est-il nécessaire que tu donnes ta vie, que tu répandes ton sang et que tu meures pour t’aquérir (sic) le genre humain ? Est-il nécessaire que tu quittes si tôt cette terre, d’une manière si ignominieuse et que tu sois maltraité des hommes outragé, injurié, crucifié pour devenir leur Roi… ». Plus loin : « C’est que Jesus-Christ veut nous apprendre quand il nous dit qu’il vit Satan tomber du ciel comme un éclair. Cependant Dieu s’était réservé quelques fidèles adorateurs parmi ces hommes que cet esprit malin tenoit sous sa puissance, et il avait mis un mur de feu et d’airain autour d’eux pour les préserver de ses machinations et de ses tromperies… » (396). Se sentant observé, notre auteur justifie chacune de ses phrases par une nouvelle salves de poncifs chrétiens. Le livre de Job et son Satan du prologue semble ne pas l’avoir laissé indifférent…
Ce manuscrit de 451 pages est difficilement datable tant le sens du texte est décontextualisé et éloigné de ce bas-monde. Ses formules ampoulées, son « monarque universel », sa syntaxe et le filigrane du papier (Charles Molitor) en forme de Bonet phrygien nous encouragent à placer cet écrit entre 1770 et 1790. La papeterie Molitor étant à cette époque la deuxième plus importante de France, on ne peut pas déterminer la région de provenance avec précision. Néanmoins, on peut placer cet écrit hors de Paris, probablement dans un lieu reculé et rural ; peut-être en Franche-Comté. Un deuxième filigrane assez énigmatique en « cornet » ou « tête couronnée » complète les indices factuels. Il faudra « creuser cette piste »…
Ce manuscrit ne comporte quasiment aucune rature. Il se termine par Amen et une Table des Matières :
« Table des discours contenus dans ce volume.
Premier discours.
Les obstacles que les hommes opposent à l’efficace de la parole de Dieu dans l’oeuvre de leur conversion.
Second discours
Les souffrances du fils de l’homme.
Troisième discours.
La tentation de l’esprit malin. »
Rapport de condition
Manuscrit, sans lieu, sans date, cartonnage brun de cahier épais ; 451 pages, in-8.