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Autocritique et danger des mots
Maint rêve vespéral brûlé par le phénix
Lot 1050

Autocritique et danger des mots Maint rêve vespéral brûlé par le phénix

Estimation : 2000 / 3000€
Année : 1974
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Le lot 50 est d’une clarté étincelante ! Gaston Ferdière ose le « j’ai la profonde impression d’appartenir autant au monde de la psychiatrie qu’on monde l’art ». Nous y sommes !

En 1974, Ferdière cite « L’exorciste » qui sort sur les écrans parisiens pour évoquer les restes moyenâgeux de croyances exaltées, de superstitions surannées, de rapports à la folie désuets. L’Histoire de la folie (1961) est passé par là. Le monde est prêt. Gaston Ferdière l’assure, voici son « Autocritique et danger des mots – Maint rêve vespéral brûlé par le phénix ». 12 pages de synthèses. Un document inédit ; une véritable mine d’or ; biffé et corrigé précieusement de la main de son auteur Gaston Ferdière.

D’emblée Ferdière s’appuie sur ses Maîtres : « Paul Guiraud qui a posé son emprunte sur mon apprentissage psychiatrique tout entier ; Georges Dumas auquel je crois devoir rendre hommage dans notre exposition parallèle ; Eugène Minkowski et Françoise Minkowska dont Denise Orson nous indiquera le sillage ; André Breton (je rappelle qu’il était un psychiatre non de fantaisie (je veux dire : ayant exercé)) ; je voudrais pouvoir donner de larges extraits de « L’art des fous, la clé des champs », texte qui m’a profondément marqué et au cours duquel je suis cité (ce qui m’a été un précieux encouragement) ; Gaston Bachelard, homme simple et accueillant qui démontrait, par ses écrits ou sa parole, que connaissance scientifique et intuition poétique peuvent se compléter avec bonheur. »

Et encore Mondor, Ey et tant d’autres… Gaston Ferdière livre un testament, propose un inventaire du travail accompli au cours du 20e siècle finissant. En prenant quelques risques, on pourrait affirmer que tout y est ; y compris une place conséquente accordée sur 2 pages au Surréalisme : « nous fêtons justement cette le cinquantenaire du Premier manifeste (…) on connait ma sympathie pour ce mouvement ; elle est active (…) j’ai étudié Surréalisme et Psychiatrie »….

Mais encore le « mot-valise » qui fit coulé beaucoup d’encre, « l’homme Cézanne » versus « la schizophrénie de Cézanne », « les bois flottés », « l’affaire Fualdes », Robert Desnos, « l’humour chez les enfants », la sorcellerie, l’art médiumnique, l’art brut, etc. Il évoque également le Docteur Itard et son « Sauvage de l’Aveyron », coeur de méprise que Ferdière se fait un honneur de corriger. Il réunira toutes les pièces (à Rodez à quelques kilomètres de la forêt de Saint-Affrique). 12 pages lumineuses !

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Auteur

Gaston Ferdière ! A l’évocation de ce nom, le regard perdu d’Antonin Artaud apparaît ; d’emblée l’impression du néophyte est désagréable. Ferdière ; celui qui a interné Artaud. Mais qui est Gaston Ferdière ? Ne souhaitant pas imposer une longue biographie, voici un échantillon de ce que l’on peut rapidement apprendre… de moins convenu. En 1930, alors qu’il a commandé à Paris une nouvelle fresque à Frédéric Delanglade, pour son hôpital, il invite à déjeuner André Breton et Marcel Duchamp. Il noue une relation extrêmement créatrice et artistique avec les surréalistes qu’il côtoie régulièrement. En 1941, afin de faire vivre son hôpital de Rodez, Gaston Ferdière n’hésite pas à pratiquer le marché noir au péril de sa vie. Ferdière est un catalyseur de rencontres, un « ovni » qui donne au « fatum » du fil à retordre et impose son rythme à la vie : « Alors que Sainte-Anne se prépare à ouvrir ses portes au public, Jean Dubuffet vient de rencontrer Gaston Ferdière qui le présente à d’autres aliénistes. Parmi ceux-ci, Lucien Bonnafé (1912-2013) , natif du Lot, qui fréquente comme Gaston Ferdière, le milieu surréaliste. Il est résistant et militant communiste et sera très impliqué dans la « psychiatrie désaliéniste » autour de 1955. Alors médecin psychiatre à l’hôpital de Saint-Alban-sur-Limagnole en Lozère, le Docteur Bonnafé soigne Auguste Forestier, auteur d’Art Brut, dont le nom sera célèbre. Il est ami de Paul Eluard qui a trouvé refuge dans cet hôpital en 1943, lui-même proche d’Aragon et d’André Breton : un chassé-croisé de rencontres déterminantes dans l’évolution de l’art psychopathologique où l’on voit apparaître des interactions entre le milieu surréaliste, l’engagement politique et le milieu médical. » (in De l’art des fous à l’art psychopathologie… » de Muriel Tisserant.) En 1946, sous le haut patronage de Ferdière est organisée la première « Exposition d’art des malades mentaux (peintures, dessins, sculptures, décorations) » ouverte au public du 16 au 28 février 1946. Evénement placé sous l’autorité du Préfet de la Seine ! Même le journal La Croix adoube Ferdière : « On s’associera à l’exhortation de ce dernier [Gaston Ferdière], d’une grande élégance morale : loin de traiter ces malades mentaux comme des étrangers […], nous devons les traiter en hommes, travailler sans relâche à leur guérison et imiter l’Eglise, comme dit le Dr Ferdière, l’Eglise qui ne perd pas de vue que la part de Dieu subsiste en eux, qu’ils ont une âme, et leur accorde des sacrements. » (L. E., « L’aliénation mentale et la création artistique », La Croix, 21 février 1946.) Ces quelques éléments de biographie et nos recherches autant que nos lectures de ce corpus extraordinaire nous ont naturellement amené à le considérer sous l’angle du « surréalisme ». Les 11 lots (44 à 54) de ce « corpus Ferdière » proposent l’articulation indispensable qu’André Breton recherchait entre les arts et notamment « l’art primitif » et la psyché humaine en ce qu’elle crée de plus authentique ; (et ce malgré son ouvrage « L’art des fous, la clé des champs » au coeur duquel, s’il se « livre à un véritable hymne à la folie, (…) n’accorde pas pour autant d’attention aux qualités esthétiques des œuvres qui sont dépendantes pour lui, de critères d’appartenance et relèvent de classifications : œuvres d’art, asilaire et médiumnique. »). Un travail de mise en relation entre Ferdière et Breton nous semble aujourd’hui indispensable au devoir d’inventaire du « surréalisme ».