Jean-Baptiste LOUYER-VILLERMAY
Amnésie
Le manuscrit de Jean-Baptiste Louyer-Villermay constitue un véritable événement dans l’histoire de la connaissance des phénomènes mnésiques. Il anticipe les travaux ultérieurs de Gratacap, Sollier, et Bergson.
Jean-Baptiste Louyer-Villermay, médecin rennais, fut connu et apprécié pour son travail de médecin des hôpitaux et notamment pour son action héroïque envers les soldats vendéens auxquels ils permettait d’échapper à ceux de la Convention. Ancien élève de Philippe Pinel, il se distingua lors de ses travaux sur l’hypocondrie, la nymphomanie et les comportements déviants, comme le prouvent ses articles dans le Dictionnaire des Sciences Médicales sur les possédés et la lycanthpopie. Les dictionnaires médicaux de cette époque destinés à un public cultivé comme aux confrères médecins recrutaient pour leurs articles les meilleurs spécialistes.
Dès la première page du manuscrit, Jean-Baptiste Louyer-Villermay se détache de la tradition doctrinale de ses prédécesseurs. Moderne, il s’inscrit d’emblée dans le puissant mouvement neurologique à peine naissant. Son style limpide, précis et truffé de références aux anciens démontre une capacité à penser le monde à partir d’un socle de connaissances intellectuelles d’une vraie profondeur. Il convoque Aristote, Montaigne, Pascal, Descartes et consorts pour construire la physionomie moderne de la mémoire. « (…) la mémoire n’est jamais que l’histoire du passé, inscrite dans nous ; faculté toute passive, humble greffier de tous les actes de la vie humaine et des événements du monde : chacun accuse sa servante de négligence et d’oubli.».
Cette servante deviendra évidemment notre impitoyable maîtresse des lors qu’elle nous fera défaut ; son absence engendre une souffrance qui devient pathologique.
Sa conception de la mémoire anticipe les découvertes d’Alzheimer et rend «praticable» le très récent mot «amnésie». Il le rend accessible à tous et modernise son emploi. Ses explications sont didactiques et très imagées. «Les mots qu’ils retiennent ((les sourds)) depuis longtemps sont ceux d’un usage plus familiers qu’ils leurs retracent des idées d’attachement ou de besoins, exemple : papa, maman, (…) dodo. Mais ils finissent par oublier ces mots qui chez eux forment le dernier anneau du langage articulé et ils perdent l’habitue de les prononcer. La voix n’étant plus exercée, ne produisant de sons, se perd entièrement ; le mutisme en devient alors la conséquence infaillible, et l’enfant, qui dans le principe n’était que sourd devient progressivement sourd et muet»
Le manuscrit retrace cette longue recherche avec autant de subtilités que de pensées vulgaires (permanence des traditions) ; l’utilisation de l’alcool comme calmant et la masturbation comme aggravant l’amnésie, en sont des preuves pittoresques. « On a dit que, pour conserver la mémoire, il fallait la cultiver, et que l’heure du matin était la plus favorable à ce travail. : il est bien vrai que la mémoire a besoin d’être exercée, mais un excès d’exercice principalement dans l’extrême jeunesse et dans un âge très avancé, expose à des accidents fâcheux».
Exceptionnel manuscrit de Jean-Baptiste Louyer-Villermay de 44 pages (recto) sur 44 feuillets (sd). Ce manuscrit orignal est très largement corrigé et biffé par son auteur. Manque au bas du premier feuillet avec perte de texte mais sans perte de sens.
informations:
Jean-Baptiste Louyer-Villermay
MANUSCRIT intitulé “Amnésie”.
44 pages.
Manques au bas du premier feuillet avec perte de texte mais sans perte de sens.
Exceptionnel élément.
Bon état.